samedi 27 octobre 2018

Portrait du libraire

Le plus beau des portraits de libraires jamais écrit en langue française, le plus sincère, le plus vécu , se trouve sous la plume de Patrick Cloux dans l'un de ses deux derniers livres : Mes oncles du dimanche (Le Temps qu'il fait). 
Il est écrit à la mémoire de Jean Rome, libraire hors pair, hors grands circuits, qui exerça rue des Gras à Clermont-Ferrand, disparu en 2008. Un bref extrait :

" Lui qui depuis toujours et à pas d'heure était là, la porte ouverte, jamais pressé de finir la journée, n'aimait pas lâcher la rambarde. (...) Berger nocturne, il aurait pu causer philosophie avec un réverbère. Il était devenu à son insu, cela l'agaçait un peu, une de nos mythologies urbaines, une part non négligeable de nos jeunesses, une des configurations mentales de nos piètres mémoires, dévorées de tant de contradictions (...) Lui, au contraire ne prêchait pas, n'évangélisait personne, , n'imposait rien . Il vous mettait un livre en main et c'était à vous de jouer.  (...) Il était devenu à la longue le témoin des lectures de ses clients, piochées sur des étagères de fortune. Un petit bois de passion lente brûlait en lui. "


Patrick Cloux a tant à nous dire qu'il sera notre invité Samedi 24 novembre 2018, à 15h. Outre Mes oncles du dimanche, il évoquera Au grand comptoir des Halles, qui paraît chez Actes Sud. 



>> Patrick Cloux, Mes oncles du dimanche, Le Temps qu'il fait, 254 pages, 21 € et Au grand comptoir des Halles, Actes Sud, 334 pages, 22 €

mercredi 24 octobre 2018

La langue en 2018

Succédant à l'excellent Mes pas vont ailleurs, de Jean-Luc Coatalem, en 2017, Idiotie vient de valoir le prix de la langue française 2018 à Pierre Guyotat
Et, de fait, cet écrit (un roman autobiographique ?), quoi qu'il se propose de dire, dans quelque sphère de la subjectivité qu'il se propose de mener le lecteur, à quelque époque de la vie de son auteur qu'il se rapporte, se distingue bel et bien par son écriture, par sa langue. 
Et sans doute n'est-ce pas la seule virtuosité, la seule maîtrise technique qui le hisse à cette qualité littéraire : on trouve de nombreux livres " bien écrits ", des livres incontestablement
" bien ficelés " sur l'étal du libraire en ce mois d'octobre et toujours. 
Ce sont les livres portés par une nécessité, vertu mystérieuse entre toutes, vertu changeante aussi pour un même créateur, qui atteignent ce point. Qu'ils nous parlent des grands thèmes de l'humanité ; de l'existence ou de l'inexistence de Dieu. Ou de la cheville que le romancier se tordit en sortant de chez lui, l'autre jour.


> Pierre Guyotat, Idiotie, Grasset, 256 pages, 19 €

dimanche 21 octobre 2018

Où est la librairie intelligente ?

Une librairie sans libraires a ouvert ses portes le 18 à Shenzhen, une ville du sud-est de la Chine.

Présentée comme "la plus grande librairie intelligente du monde", cette chose s’étend sur une surface de 178m2 et est ouverte 24 heures sur 24. Sa particularité ?  Miser uniquement sur la technologie pour satisfaire les besoins de ses clients, hors de l'humain.
A cette anti-librairie absolue, opposons La Librairie de tous les possibles, de l'auteur japonais Shinsuke Yoshitake. Elle est cornaquée par un petit libraire marrant et aux ressources illimitées.
Celle-là est la vraie librairie intelligente.

> Shinsuke Yoshitake, La Librairie de tous les possibles, Milan, 104 pages, 13,90 €