samedi 2 juillet 2016

Entende qui a des oreilles

Thierry Paquot, Le Paysage, La Découverte,
125 pages, 10 €
Les paysages n'ouvrent pas seulement sur une dimension visuelle. Ni olfactive. Les paysages ont une réalité sonore, ce que l'on sait depuis le XIXe siècle,
au moins. Témoin cette page de Simeon Pease Cheney, un maître de chant qui vivait en Nouvelle-Angleterre et  qui observa : " A coup sûr, depuis que cette boule s'est mise à tourner à travers les espaces infinis  au diapason de la musique des sphères, les éléments ne furent jamais silencieux. Leur voix n'ont cessé de résonner d'accords combatifs, dans le feu et les flots, de l'équateur aux pôles, d'innombrables siècles avant que les monstres marins et terrestres ne joignent leurs mugissements au chœur de l'univers. (...) Entende qui a des oreilles. "
Aujourd'hui, nous possédons de nombreux instruments pour enregistrer les voix de la nature et des espèces naturelles, pour cartographier le paysage sonore.
Bernie Krause, bioacousticien, s'y emploie avec ardeur, comme en témoigne son " Manifeste pour la sauvegarde des paysages naturels " intitulé Chansons animales et cacophonie humaine.

Sur la cacophonie humaine, Charles Fourier, le grand utopiste avait son idée : les villes, disait-il, sont bruyantes parce que les Français ont une mauvaise oreille : ils entendent faux. D'où la pollution sonore, qui atteint aujourd'hui ses plus hauts sommets.
Sur le monde naturel, Bernie Krause a son idée aussi : il faut en préserver l'acoustique pour que demeure " une géographie de l'espoir ".
Le libraire vous donne rendez-vous aux champs pour écouter les oiseaux ; ou, à défaut, dans le parc quand la ville est calme et laisse filtrer chants et bruits d'ailes. Avec un peu de chance, vous entendrez même jouer les écureuils si vous vous tenez tranquillement sous les arbres avec votre livre.

Bernie Krause, Chansons animales
et cacophonie humaine, traduit de
l'anglais par Amanda Prat-Giral,
Actes Sud, 110 pages, 16 €

vendredi 1 juillet 2016

Causes de l'absence

Mais, au fait, où était parti le libraire tout ce temps ? Devinez un peu.
 
Pierre Deslais, Le Périgord. Géographie curieuse
et insolite, Ouest France, 117 pages, 15,90 €
Jérôme Hutin, Arbres. Trésors vivants du Périgord,
Les livres de l'îlot, 201 pages, 34 €
 

jeudi 30 juin 2016

D'exil en exil

Beat Generation, New York, San Francisco, Paris
 Centre Pompidou, 304 pages, 44,90 €
 
Tandis que la génération beat s'assied pour un moment au Centre Pompidou après avoir connu l'exil intérieur de New York à San Francisco et Paris, avec ses chambres d'hôtel, ses bars bohémiens, ses poèmes jazzés et ses séjours
sur la tombe d'Apollinaire (" Je me suis rendu au
Père-Lachaise à la recherche de traces d'Apolli-naire ", commence un poème d'Allen Ginsberg),
pendant ce temps donc, le bosnien Velibor Čolić campe le portrait d'un migrant frotté de littérature et exilé en France. Avec sa découverte des gares parisiennes, des taxis, des plateaux télévisés, du métro et des bars :
" Assis tel un pacha derrière le zinc, je me présente au barman comme HB.
-- Vous voyez mon ami, je suis HB, le Hemingway bosniaque. C'est du costaud, moi. Faut pas me chercher. "
Velibor Čolić, réfugié politique, qualifie son roman de " sentimental journey ", ou de " voyage senti-
mental ". Pour accompagner la lecture de son Manuel d'exil, il conseille d'écouter " Monk's Dream, sublime album de l'unique Thelonious Monk ".
D'une certaine façon, exil pour exil, la boucle est bouclée.
Velibor Čolić, Manuel d'exil. Comment
réussir son exil en trente-cinq leçons,
Gallimard, 200 pages, 17 €

 
 

mercredi 29 juin 2016

Hey !

Hey ! la revue d'art bilingue (français-anglais) vient de souffler ses six bougies au mois
de juin. Feuilleter l'un de ses vingt-six numéros est une expérience qui décoiffe.
Incarnant, selon ses propres dires "la défense de territoires affranchis de la norme, une alternative à la vision d'une culture unilatérale ", chaque numéro condense des expressions graphiques très fortes.
Dessin numérique, art populaire, artistes échappés des premières années d'école de dessin, culture de rue, tatouage et pop s'y donnent rendez-vous. Animée par des rédacteurs en chef qui sont eux-mêmes artistes et commissaires d'exposition, la revue est désormais bien installée dans la provocation et le débridé.

Hey ! n° 26, 143 pages, 19,90 €