samedi 11 mars 2017

Le Grand Débat à Vichy (2)

Deuxième journée du Grand Débat
organisé par la ville de Vichy au Grand palais.
Avec au menu les rencontres suivantes :
14 heures :  Marcel Gauchet
 
 
 
16 heures 15 : Pascal Picq
 
 
 
17 heures 30 : Raphaël Enthoven
 
Les auteurs dédicaceront leurs livres
 au stand tenu par les libraires à l'issue de chaque débat.
 
 

vendredi 10 mars 2017

Bonjour monsieur Losfeld !

Eric Losfeld, Endetté comme une mule,
Tristram, 312 pages, 11,40 €
Republier les mémoires d'Eric Losfeld, quelle bonne idée ! Losfeld : un loustic de première ! Qui parlerait comme lui aujourd'hui, aussi vertement, aussi dignement ? Cela causerait un festival de mines offensées. Ce n'est pas lui, parti de rien et qui finit endetté "comme une mule ", qui aurait laissé échapper la moindre plainte.
Mais, au fait qui était Losfeld et dans quelle sphère opérait-il ? Monsieur Losfeld (1922-1979) était un éditeur. Un vrai, c'est-à-dire un passionné. Pas un affairiste, pour lesquels il n'exprime ici que mépris.  " Le travail dans l'édition n'a jamais été une mine d'or , prévient-il : je le dis à l'usage des jeunes qui désirent s'y lancer sans protection, ni recommandation ".
Sur ce point, c'est un peu ce qu'il advient, mettons, aux libraires qui voudraient se lancer dans les mêmes circonstances (d'ailleurs, Losfeld, décidément un gars bien, fut lui-même libraire). Mais bref, voilà un homme qui encaissa les coups les plus rudes. Dont celui-ci, de la part d'un
" grand " éditeur bien connu sur la place et plus largement encore, chez qui il était venu dénoncer de mauvais procédés : " Mon cher monsieur, si nous devions nous occuper de tous les petits éditeurs qui gravitent autour de nous et qui fatalement se casseront la figure, je serais obligé de créer un service spécial, et je n'en ai pas les moyens. "
Losfeld fut soutenu par Breton et Queneau en même temps. Il dut faire face à la censure. Il publia Ionesco donc, fit tant de découvertes et de redécouvertes, qu'il en arriva à publier deux énormes succès de librairie : Emmanuelle et Barbarella, en laquelle on voudra sûrement reconnaître la silhouette de François Hardy ou de Brigitte Bardot. La liste complète de ce qu'il édita, livres, revues, anthologies figure en fin de volume. C'est Losfeld qui répondit à un directeur de revue très en vogue au milieu des années 1960 : " Monsieur, J'ai bien reçu votre lettre du 6 courant, elle me confirme que nous ne sommes pas sur la même " Planète ". Je n'ai jamais sollicité une critique pour l'un de mes livres, je crois même ne vous avoir jamais adressé un service de presse. "
Si le billet du libraire est un peu confus, sa conclusion ne le sera point. Elle est d'Eric Losfeld en personne : " A la formule assez louche ' Vivre dangereusement ' des Malraux et autres matamores, je préfère vivre merveilleusement, ce qui supprime toute idée de gloriole et de profit. "
Chapeau bas, Monsieur Losfeld, chapeau bas.

jeudi 9 mars 2017

Prodiges du microsome et de macrocosme chez Hubert Reeves

Hubert Reeves, J'ai vu une fleur sauvage.
L'herbier de Malicorne
, Seuil,

254 pages, 18 €
Il n'y a pas loin des étoiles aux fleurs et des fleurs aux étoiles.
C'est la démonstration que vient de faire Hubert Reeves, astrophysicien et botaniste. Sous le titre (un peu tendre dans ce monde ultra-dur) de J'ai vu une fleur sauvage, il offre aux amateurs un délicat florilège des fleurs les plus communes des bords de chemin et des lieux rustiques. Le libraire trouve que c'est là faire preuve de bon goût. Penchez-vous un peu sur la Tanaisie, sur le Silène, sur la Petite Pervenche, sur la Clématite sauvage et dites un peu si c'est mensonge !

Ces petites merveilles ont trop souvent été les négligées, les inaperçues de nos vadrouilles champêtres. Elles ne sont pas clinquantes, elles ne font rien pour attirer les regards à soi : elles n'ont rien compris à cette époque où il faut faire grand tapage pour être remarqué. Elles n'ont pas le sens de la gloriole. Peut-être bien qu'elle s'en moquent.
Toujours est-il que les photographies en gros plan de Patricia Aubertin sont la vengeance de ce peuple d'en bas parmi les fleurs. Et puis, ne les coupez pas, s'il vous plaît : elles ne supportent pas la mise en vase. Autorisez-vous tout juste à en faire sécher une ou deux entre les pages d'un livre acquis chez le libraire.
Après cela, essayez de glisser une étoile entre les pages de votre livre. Pour voir.


Hubert Reeves, Les Secrets de l'univers, Bouquins,
714 pages, 29 €


mercredi 8 mars 2017

Journée des femmes

Christine Bard, Sylvie Chaperon,
Dictionnaire des féministes, PUF, 32 €
En cette journée mondiale de la femme, le libraire ne fera pas les choses à moitié (est-ce dans ses habitudes, franchement ?) Il a d'abord repéré un Dictionnaire des féministes que proposent les éditions des PUF. L'ouvrage concerne la France et couvre la période XVIIIe-XXIe siècle. Il est dirigé par Christine Bard et Sylvie Chaperon, dans l'esprit universitaire propre à l'éditeur. Fort de 195 collaborateurs et collaboratrices, il inclut les thématiques les plus récentes, comme  s'y emploie Caroline Dayer dans un esprit non moins militant. Sous les pavés, le genre, est le titre de cet essai au ton indigné.
Dans " un manifeste pour une éducation fémi-      niste ", Chimamanda Ngozi Adichie, romancière  nigériane, déjà auteur de Nous sommes tous des féministes (Folio) se tourne, pour sa part, vers les plus jeunes générations.
Elle avance quinze suggestions destinées à transmettre une éducation féministe.
Jessica Bennett, elle, a créé un groupe de combat (un fight club, en français corrigé par son éditeur) contre le sexisme ambiant. L'humour est très présent dans l'entreprise de cette journaliste new yorkaise. Son manuel de survie a été déclarée " arme de pointe dont les femmes avaient besoin " car il examine des situations très concrètes en milieu professionnel, dans les soirées, les familles et ainsi de suite. Beaucoup d'exemples que contient son livre sont néanmoins très américains.

 
Caroline Dayer, Sous les pavés, le genre,
L'Aube, 94 pages, 10 €
Chimamanda Ngozi Adichie, Chère Ijeawele,
Gallimard, 78 pages, 8,50 €
Jessica Bennett, Le Fight club féministe,
Autrement, 295 pages, 17,90 €

mardi 7 mars 2017

Histoire de coquilles

Louis Guéry,
Dictionnaire des règles typographiques,
Victoires éditions, 290 pages, 24,40 €
Aux lecteurs qui s'alarment, à bon droit, du nombre de coquilles, mastics, impropriétés, bourdons, doublons, omissions, fautes de grammaire et autres cheminées, veuves et orphelines qui constellent les ouvrages présentés à son étal, le libraire tient à déclarer : rassurez-vous ! 
Ce trait aussi fâcheux qu'irritant n'est pas le propre de notre époque.
Chez Giacomo Leopardi, dont nous avons fait la connaissance il y a peu de jours (le 5 mars, très précisément), on peut lire dans une lettre du 4 mars 1826 qu'il destine à un certain Gian Pietro Vieusseux la lamentation qui suit :

" Mon cher, très aimable et très estimé Monsieur.
Je vous remercie de l'honneur que vous avez fait à mes dialogues en les publiant dans votre journal. Je me suis toutefois rendu compte que je n'ai pas su bien expliquer à Giordani mes intentions à ce sujet. J'ai également été un peu mortifié par les nombreuses et terribles fautes qui se sont glissées dans le texte pendant l'impression (au point que souvent je ne me comprenais pas moi-même en me relisant), ainsi que par l'orthographe barbare qui y règne. " Et il poursuit : Bien que l'article qui me concerne porte le titre de premier extrait, je ne pense pourtant pas que vous ayez l'intention de publier d'autres dialogues, dont vous n'avez plus d'exemplaire puisque vous m'avez renvoyé mon manuscrit, que je vous sais infiniment gré de m'avoir promptement réexpédié. S'il en allait autrement, je vous prierais, si cela ne vous dérange pas, de suspendre pour le moment cette  publication. "
Comme cela est courtoisement, mais nettement, exprimé !

lundi 6 mars 2017

La Semaine de la poésie vous invite

 
 
Vous êtes, bien entendu, tous conviés à la soirée d'inauguration du festival qui aura lieu
ce vendredi 10 mars à 18h
au sein de l'ESPE de Chamalières (36, avenue Jean-Jaurès).

 
C'est avec
Albane Gellé, Ludovic Degroote, Antoine Emaz et James Sacré,
parrains de cette édition,
que nous déclarerons ouverte la 30e Semaine de la poésie.


Soyez au rendez-vous tout au long de la semaine,
à Clermont-Ferrand et aux alentours !

(Le libraire communiquera le menu A la Page
dans ses prochains billets : d'ores et déjà,
le programme complet de la manifestation
est disponible près du divan rouge et à la caisse)

dimanche 5 mars 2017

Eloge de la discrétion

Luc Boltanski, Arnaud Esquerre,
Enrichissement. Une critique de la
marchandise, Gallimard, 663 pages, 29 €
Luc Boltanski et Arnaud Esquerre 
le laissent entendre dans leur dernier essai : l'artiste (au sens large de ce mot : l'écrivain, l'éditeur, le
peintre ou le chanteur) qui n'assure pas en permanence sa propre promotion en se faisant
" le commerçant de soi-même " a toute chance de ramer à l'ombre de ses confrères plus experts que lui en l'art de la mise en valeur de soi par le discours et l'image.
S'il en est un, dans un autre siècle il est vrai, qui s'avouait incapable de se faire son propre marchand et sa propre marchandise (mais on le lit encore aujourd'hui), c'est bien Giacomo Leopardi (1798-1837).
Le libraire a relevé ce passage dans un recueil de lettres tout juste paru en Rivages poche sous le titre de L'art de ne pas souffrir :
" En attendant, et comme je ne peux et n'ai jamais pu supporter qu'on me croie plus que je ne suis, ou qu'on me croie capable de ce que je ne sais pas faire, permettez-moi d'ajouter ceci. Votre idée de l' " Ermite des Apennins " est en soi très judicieuse. Mais pour que ce bon ermite puisse fustiger nos mœurs et nos institutions, encore faudrait qu'avant de se retirer dans son ermitage, il ait vécu dans le monde et joué un rôle non négligeable et non marginal dans les affaires de la société. Or tel n'est pas mon cas. Ma vie, d'abord sous la nécessité des circonstances et contre mon gré, puis par une obligation née de l'habitude, transformée en nature et devenue indélébile, a toujours été, est et sera perpétuellement solitaire (...) Ce vice de l'absence est en moi incorrigible et désespéré. "
Il n'est pas sûr que Leopardi n'ait pas souffert, ni qu'il n'ait pas connu l'amertume. Il semble avéré, en revanche, qu'il aurait été un bien mauvais " client " sur un plateau de télévision, et un boulet pour ses éditeurs qui eussent mis leurs espoirs dans sa carrière et, par ricochet, dans la leur.
Giacomo Leopardi, L'Art de ne pas
souffrir, traduction, préface et notes
de Philippe Audegean, Rivages poche,
143 pages, 7,90 €