Armand Farrachi, La Tectonique des nuages, José Corti, 255 pages, 21 € |
à ce mot et que Farrachi lui-même carac-térise comme l'association d'une expérience personnelle ou d'un souvenir avec une interrogation plus générale.
Quand un essai est réussi, ce mariage de l'expérience et de la réflexion fait mouche. Nous n'avons pas nécessairement fait les mêmes expériences que l'auteur ou nous n'en tirons pas toujours les mêmes leçons. Mais il nous met, pour ainsi dire, le pied à l'étrier : " et moi, qu'aurais-je pensé, dans cette circonstance ? " ; " ai-je réagi comme lui à la majesté
de ce paysage ? " ; " ai-je compris comme lui cette lecture ? " . C'est que, dans l'essai, le point de vue de l'auteur est à la fois présent et non-totalitaire :
il laisse respirer et vivre la subjectivité de son lecteur. Il en est le tremplin.
Dans La Tectonique des nuages, il est question de la nature extérieure, de la condition animale, de l'aveuglement suicidaire des hommes, des charmes des passantes, aussi bien que de la beauté des pavés et de leur usage. Le libraire a été particulièrement ému par la chapitre intitulé " Les revenants", où il est question de nos rapports avec les êtres disparus. Sujet plutôt sombre, dira-t-on, et mal fait pour le commerce qui se doit de distraire à tout prix le chaland. Mais ceci : " Ne serait-ce pas trop beau , trop triste, trop simple d'oublier soudain nos parents et nos amis au moment de leur mort, de même que nous cessons de voir le jour quand la nuit est tombée ? Quoiqu'ils n'existent déjà plus, on continue de les aimer, de les attendre, de penser à eux, de reconnaître leur pas dans l'escalier, leur clef dans la serrure (...) Les voyageurs voyagent, les penseurs pensent, les revenants reviennent, on n'y peut rien. Ils sont là. Mais où ? Ce que nous appelons nos souvenirs sont-ils des visites, des séjours, d'éphémères résidences ? "
N'êtes-vous pas remués lisant ceci ?
Armand Farrachi |
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