En 1992, Teodor Cerić, étudiant en lettres, quitta son pays bombardé par l'armée serbe et vagabonda à travers l'Europe de l'Ouest. Il vécut de petits boulots, profitant des tuyaux qui lui étaient donnés ou consultant les annonces des journaux ou des commerçants pour trouver de l'embauche.
Trois ans plus tard, il rentra au pays et, en 1998, se retira non loin de Sarajevo, publiant chroniques et poèmes. Puis, il décida de se taire, jusqu'à ce que Marco Martella, son traducteur et lui-même passionné de jardins*, obtienne son accord (le lui arrache, plutôt) de publier en français Jardins en temps de guerre que voici.
Il s'agit de sept chapitres regroupant les souvenirs de jardinage de Teodor. Des jardins très différents entre eux : anglais, grecs, parisiens, italiens ; jardins de centre ville ou jardins de banlieue autour des maisons ; jardins raffinés et jardins sauvages ; jardins ouverts et jardins clos
– ceux qu'il préfère, sans doute.
Jardins dans lesquels il a travaillé non comme noble paysagiste, mais comme désherbeur sans grade, comme poète " aux angles noirs de terre ".
De cette expérience et de celle du vaste monde, Teodor a conclu que le jardin est l'endroit où il se sent chez lui. Un espace que les guerres ont épargné. Un lieu de résistance, dont il écrit ceci : " Je le retrouve chaque matin, lorsque je sors de ma maison à l'aube et qu'immanquablement je m'arrête, ébahi devant tant de grâce qui apparaît pour moi, rien que pour moi, sortant des ténèbres. Je le regarde frémir comme une bête sauvage de la forêt qui, par je ne sais quel miracle, aurait consenti à se laisser domestiquer. "
Teodor est un jardinier de caractère. Mais existe-t-il vraiment ? Ne serait-il pas plutôt un jardinier de papier, le nom de guerre de son traducteur, comme Jorn de Précy, la précédente créature de Marco Martella ?
Teodor Cerić, Jardins en temps de guerre, récit traduit du serbo-croate par Marco Martella, Actes Sud , collection " Un endroit où aller ", 152 pages, 16 €
* Marco Martella dirige la revue Jardins (éditions du Sandre).
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