Esther Kinsky, La Rivière, traduit de l'allemand par Olivier Le Lay, Gallimard, 394 pages, 24,50 € |
Un beau jour, comme l'on dit un peu sottement, la narratrice de La Rivière, vient s'installer dans un de ces coins, dans la banlieue de Londres, près d'un cours d'eau nommée la Lea, affluent de la Tamise. "Une fois que j'eus découvert les parcs et les marécages, j'en repris le chemin presque quotidiennement. Je descendais toujours le cours de la rivière, poussant chaque fois un peu plus loin, je me cramponnais au fil de l'eau comme à la corde d'une mince passerelle jetée sur l'abîme. La rivière charriait le ciel, les arbres de la berge, les fleurs en épi un peu desséchées sur les nuages. Entre les terres désertes de la rive et les usines et lotissements qui foisonnaient sur l'autre rive, j'ai retrouvé des morceaux de mon enfance, d'autres fragments découpés dans des photographies de paysage ou des portraits de groupe et qui, à mon grand étonnement, étaient venus s'établir là. "
Des non-lieux ces endroits délaissés ? Esther Kinsky prouve, discrètement, qu'il n'en est rien. Elle excelle dans l'art d'en faire des paysages à part entière, dignes d'être sentis et célébrés, des zones marginales devenues des beautés mystérieuses et grandes.
La langue de cet auteur et traductrice allemande, qui obtint en 2014 pour son roman le prix Franz Hessel (grand promeneur sous le firmament), est d'une précision qui fait de la description une forme accomplie de poésie. Elles est juste ; ni plate ni sur-travaillée. Son phrasé est calme et lent, comme la rivière de nos rêves. Ce récit, qui s'écarte des sujets archi-prévisibles et rabâchés pat la presse en chœur, constitue, pour l'heure, la vraie grande bonne surprise de cette rentrée de septembre. Toutes langues confondues. De loin.
Voilà ce que pense le libraire.
Esther Kinsky |
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