dimanche 31 juillet 2016

Doudou et existence

Laurent Richard, Où se cache mon doudou ?
L'élan vert, 12 €
Aujourd'hui, dans sa mini-chronique,
le libraire désire vous entretenir d'une question brûlante ; d'une question relative
à la tranquillité de toute la maisonnée où se trouve un petit enfant ; une question à régler d'urgence : la question du doudou
(ou, dans le langage savant initié par Donald Winnicott, la question de l'objet transitionnel).
On ne plaisante pas avec ce genre de choses : un doudou égaré, un doudou oublié, un doudou abandonné et c'est une rencontre avec des amis qui est fichue ; une sieste dominicale qui est naufragée ; une mise au lit qui est indéfiniment retardée et tout le monde qui guette avec anxiété l'endormissement du petit ou de la petite.
Donc, autant prendre ses précautions. Comme celle de prévoir des doudous de rechange, même s'il y a un doudou préféré dans la collection ; ou celle de toujours connaître la position des doudous dans la maison et le jardin ; ou bien, alors, celle de prévoir un GPS domestique. Le libraire a des souvenirs assez précis à ce sujet et, très vite, il sut corriger le tir, ne pas rester plus de quelques instants sans doudou à porter de main.
Il reste aussi la solution de lire avec le petit ou la petite les deux ouvrages de protection suivants : ils sont propres à désamorcer quelques accès de désespoir éventuels. Où se cache mon doudou, d'abord, est basé sur le même principe que le célébrissime Où est passé Charlie ? Il y a plein de doudous dessiné sur une page et un seul vrai doudou qu'il s'agit de retrouver parmi toutes ces images. Cela montre au petit qu'égarer une seconde son doudou est une expérience de détresse universelle.
Le second ouvrage que le libraire recommande s'intitule Le Mange-doudous, dans lequel Julien Béziat montre par A plus B (merci Julien) qu'il n'est pas possible que tous les doudous aient disparu en même temps. Le plus affamé des Mange-doudous, même doté par la nature d'un estomac en béton, ne saurait pouvoir digérer tous ces doudous. Et surtout pas celui qui s'appelle Berk, le plus vieux et, disons-le tout net, le plus répugnant d'entre eux, selon les critères discutables et discutés des parents.

Julien Béziat, Le Mange-doudous,
Lutin poche, 5 €









samedi 30 juillet 2016

Je crois aux livres...

Jean Starobinski, La Beauté du monde,
Quarto, Gallimard, 1342 pages, 30 €
Voici quelques réponses données par le critique et essayiste Jean Starobinski (dont Quarto vient de publier La Beauté du monde, un fort volume d'essais) à un questionnaire relatif à ses raisons d'écrire :

Ecrivez-vous : Pour tenter de résoudre des problèmes personnels ? Pour établir un contact avec autrui ? Pour le plaisir d'inventer d'autres univers ? Pour cerner la réalité de plus près ? Contre quelqu'un ? Contre quelque chose ?
Contre l'obscurité, la confusion, l'oubli, la mort ? Pour mieux comprendre et faire mieux comprendre

Dans quelle mesure vos livres sont-ils autobiographiques ?
Dans la mesure où celui qui s'oublie le plus complètement ne peut éviter de se trahir, de se manifester...
 
Vous considérez-vous comme un " écrivain " ou comme un " écrivant " ?
Je ne veux rien m'interdire. La poésie et les " idées " ne s'excluent pas.

Croyez-vous aux livres ? (Sinon, pourquoi écrivez-vous alors ?)
Je crois aux livres comme je crois aux maisons et aux arbres.

En 1920, la revue La Révolution surréaliste avait posé la même question à ses contemporains. Parmi les réponses les plus brèves, ces deux-là :

Max Jacob : Pour mieux écrire !
Blaise Cendrars : Parce que.
L'enquête de la Révolution surréaliste

vendredi 29 juillet 2016

Nostalgie des sciences

Georges Colomb, La Classe de sciences,
Armand Colin, 264 pages, 12,90 €
La nostalgie a de beaux jours devant elle.
Ainsi pense, du moins, le monde de l'édition. De plus en plus nombreuses sont les rééditions en facsimile des bons vieux ouvrages du bon vieux temps, jouant sur la corde sensible du lecteur.

La géographie et l'histoire sont particulièrement sujettes à ces remémorations. Mais ici, c'est un  manuel de sciences naturelles que reprennent à l'identique les éditions Armand Colin, leur premier éditeur en 1925.
Illustré de vignettes pédagogiques à la manière des meilleurs graveurs du XIXe siècle, ou des images d'Epinal, il est l'œuvre de Georges Colomb  (1856-1945), dont le nom est parfaitement oublié. Mais peut-être pas son pseudonyme : Christophe (pas le chanteur), l'auteur du Facteur Camembert, de L'Idée fixe du savant Cosinus et des Malices de Plick et Plock.
Ouvrage caractéristique de l'esprit de la IIIe République et d'une " science vertueuse ",
La Classe des sciences frappe par la simplicité de son organisation visuelle et textuelle destinées à développer le sens de l'observation des enfants. Les animaux des campagnes posent gentiment côte à côte sur les planches en pleine page. Les fossiles font de même. Sans omettre les plantes et leurs racines.
A propos de plantes, L'Atlas de poche des plantes des champs, des prairies et des bois à l'usage des promeneurs et des excursionnistes (1910) répond au même sentiment : " Les textes de ces livres, nous avertit son éditeur, rédigés dans un style de vulgarisation scientifique délicieusement suranné, sont exactement identiques à ceux de la publication originale. "
Reste que, ici, les planches en couleur sont de toute beauté et restituent, bien mieux que ne saurait le faire la photographie, le charme des plantes des bords de chemin, les plus humbles, les plus touchantes, les plus éphémères. Arrêtez-vous un instant devant la Moutarde des champs, le Compagnon blanc, le Bleuet, la Centaurée Jacée et tant d'autres. Et ouvrez les yeux.

Atlas de poche des plantes des champs, des prairies et des bois à l'usage des promeneurs et des excursionnistes,
Editions Le Bibliomane, 336 pages, 19,50



jeudi 28 juillet 2016

A vos pieds



A vos pieds, Actes Sud/Musée des Confluences,
14 pages, 19 €
Babouche ou godillot, sandale ou savate, tong ou bottine, sabot ou escarpin, la chaussure se déploie en grande pompe !
En fait " quand ils ne vont pas nus, les pieds se parent d'une minuscule architecture qui les habille et qui peut en dire long sur nous. Rien d'anodin, en effet,  dans le choix de nos chaussures. Les messages qu'elles transmettent sont aussi importants que leur rôle de protection du pied ", comme l'écrit l'une des responsables de l'exposition " A vos pieds ".
Et ce double rôle de protectrice et de messagère, la chaussure l'a tenu à travers l'histoire et les civilisations. Les exemples qui en sont donnés par le livre que publient Actes Sud et le musée des Confluences nous en persuadent aisément. De la chaussure d'enfance à la chaussure de prestige, en Corée, en Syrie, chez les Iroquois, en Italie, chez les chamanes australiens ou en Chine, les objets photographiés sont magnifiques d'astuce et de beauté, tant par leur matière, leur texture que par leur couleur.
Mais la chaussure dit aussi bien le prestige que la pauvreté ; elle est princière, mais aussi rafistolée ou banalement quotidienne. "Que se passerait-il si nous regardions dans tous les souliers qui nous ont portés ? " s'interroge Xavier G-Solis en conclusion. " Des premières éraflures sur notre première paire de chaussures -- première parure sociale -- jusqu'à notre dernière pantoufle, cet examen dévoilerait-il des choses essentielles ? Notre biographie serait-elle révélée ? Ce que nous sommes serait-il mis au jour ? "

mercredi 27 juillet 2016

Voir clair

Jacques Lusseyran, Le Monde commence
aujourd'hui, Folio, 192 pages, 6,50 €
" Je suis devenu aveugle par accident, alors que je n'avais pas tout à fait huit ans. Complètement aveugle et définitivement. Au moins, selon les définitions et le vocabulaire de ceux qui ne sont pas aveugles. Car, pour moi, il en allait tout autrement.
Je voyais encore. L'opération visuelle ne se produisait plus par l'intermédiaire de mes yeux, cela est vrai. Mais elle se produisait : elle avait lieu au-dedans de moi, dans un espace intérieur qu'il est difficile de circonscrire, mais, après tout, ni plus ni moins que l'espace extérieur. J'insiste : toute chose qui venait à ma rencontre était aussitôt vue, vue et non touchée ou entendue : elle se dessinait, prenait forme et couleur sur un écran interne. Et cela sans que je fisse rien pour déclencher le phénomène. Au reste, comment aurais-je fait quoi que ce fût, moi qui n'avais encore que huit ans. "
Ces lignes sont extraites de Le monde commence aujourd'hui, de Jacques Lusseyran, qui poursuit :
"Cette projection visuelle des objets sur l'écran interne présentait une différence importante avec les images de la mémoire. Celle-ci, les souvenirs, je les voyais aussi, mais dans ma tête, au niveau et de mon front et de mon cerveau. Celles-là, les choses vues, je les percevais beaucoup plus largement : dans l'ensemble de mon organisme. "
Outre Le monde commence aujourd'hui (1959), Lusseyran a publié Et la lumière fut (1953). Aveugle, donc, dès son jeune âge, il fut écarté de la fonction publique en raison de sa cécité en 1943, par décision du ministre Abel Bonnard. Arrêté cette même année, pour fait de résistance active, il fut conduit à Buchenwald et libéré en avril 1945. Jérôme Garcin a retracé ces années dans Le Voyant, également paru chez Folio.
Les aveugles sont restés exclus de l'enseignement public jusqu'en 1955.
N'est pas voyant celui qui le croit.
Jacques Lusseyran, Et la lumière fut,
Folio, 432 pages, 7,70 €

mardi 26 juillet 2016

Le promeneur secret

Caroline Drillon, Marie-Claire Ricard,
L'Auvergne pour les nuls,
First, 392 pages, 12,50 €
Bien sûr, vous pouvez sillonner l'Auvergne sur les sentiers fléchés. De nombreux guides, parfois très utiles et bien faits, vous y aideront. Quelques uns se proposeront de vous offrir
des charmes insolites et pourquoi résister à certains d'entre eux ? Le temps peut manquer pour des excursions plus personnelles, au gré du vent ; l'inspiration peut faire défaut.

Les charmes insolites de l'Auvergne,
Christine Bonneton, 176 pages, 17,50 €
Vous pourriez aussi , bien que l'Auvergne ne soit pas son propos ultime, vous perdre sur les chemins de prose de l'ami François Graveline. C'est un résident. Il peut décider à tout moment de s'immerger dans l'imaginaire sur les routes et à travers champs de la géographie auvergnate. Promeneur secret, qui ne dérange pas la flore ni ne perturbe l'ordre sonore des vaches (le libraire en parlait il y a peu), il a tracé son pays. Ses capitales hébergent parfois cinquante âmes. Ses ruisseaux sont des océans -- l'océan qui l'envahit de remords. Ses planques sont discrètes, mais il a ses œuvres d'art, ses monuments. Il a ses temples.
Il a ses neiges. Il a ses ascensions. A la Chomette, au Cluzel, à Heume-l'Eglise :
on craint de révéler les toponymes, on craint de les crier trop fort. Ce n'est pas qu'on veuille
les garder pour soi seul, mais on fuit le tapage.
Majestés est le titre de son dernier livre.

François Graveline, Majestés,
99 pages, 14 €


lundi 25 juillet 2016

Histoire de titres

Si l'on demandait à des éditeurs français : " Quel est votre animal préféré ? ",
ils répondraient sans doute : " Le chat. "






Si on leur posait la question : " Quel est votre fruit préféré ? ",
ils diraient probablement : " Les fraises. "






Et  si l'on demandait : " Quel est votre chiffre favori ? ", chez Gallimard on répondrait :
" 7 ". Ou bien : " 75 " .Ou bien : " 2084 ".


 






dimanche 24 juillet 2016

Prix Goupil 2016 : à vos agendas !

Muriel Zürcher,
prix Goupil des jeunes lecteurs A la Page 2016
pour son roman Robin des Graffs (Thierry Magnier)
sera l'invitée du rayon jeunesse
SAMEDI 1er OCTOBRE PROCHAIN
 Jeunes lecteurs (et moins jeunes)
vous viendrez nombreux
à sa rencontre !

samedi 23 juillet 2016

Eloge de la vache et de la poule

Christian Laborde, La Cause des vaches,
Editions du Rocher, 144 pages, 15 €
Le libraire va, dès qu'il le peut, cheminer dans les proches montagnes.  Et ses promenades sont l'occasion de fraterniser avec elles, les vaches, de toutes races qui, par chance, paissent dans les prés alentour. (Arthur Rimbaud : " Le soir ? Nous reprendrons la route / Blanche qui court / Flânant comme un troupeau qui broute, / Tout à l'entour ")
Comment dès lors ne fraterniserait-il pas, le libraire, avec la cause que défend aujourd'hui Christian Laborde contre l'élevage intensif :
" 1000 vaches, 750 génisses arrachées aux prairies, privées de la compagnie des piafs, menottées, entravées, incarcérées sous l'infernale tôle d'un hangar sans fin, la tête coincée entre des barreaux d'acier, les sabots pourrissant sur le ciment souillé, le ciel jamais : pauvres bêtes !  Horrible la vie qu'on leur impose. Atroce la mort qu'on leur réserve. "
Dès qu'il le peut le libraire va aussi cheminer le long des fermes où habitent des poules de toutes races.
Comment, dès lors, ne fraterniserait-il pas avec ces ravissantes compagnes des campagnes ? Dans Tout pour ma poule, Elise Rousseau a réuni  à l'attention des " amateurs de poules, éleveurs de poussins, ramasseurs d'œufs, gourmets du coquetier " une somme de connaissances pratiques, éthologiques et esthétiques propres à donner la dignité qu'elles méritent à ces (souvent) mal-aimées. " Leur joie de vivre, affirme Elise Rousseau, rend la gaieté aux déprimés, leur optimisme fait fuir les idées noires des plus défaitistes, leur vivacité réveille les plus engourdis. ", La poésie en marche, quoi.

Elise Rousseau, Tout pour ma poule,
Delachaux Niestlé, 176 pages, 17,50 €

vendredi 22 juillet 2016

Les beaux étés

Zidrou et Jordi Lafebre, Les Beaux étés 2
La Calanque, Dargaud, 56 pages, 13,99 €
Le deuxième volume de Les Beaux étés nous reporte à l'année 1969.
C'est la formule inventée par Zidrou et Jordi Lafebre que de raconter les étés favoris de la famille Faldérault. La vie
non de célébrités, d'acteurs dont le nom occupe le haut de l'affiche ou de personnages opulents avec des grosses montres de marque au poignet.
Non, la vie, la vie jolie, de ceux que

George Orwell appelait les gens ordinaires.
La 4 L, les enfants qui trouvent la route longue, les pauses pipi, le couple qui se chamaille et les vacances au sud un jour d'été 1969, tandis que résonne " Je t'aime moi non plus" de Serge Gainsbourg et Obladi-oblada des quatre garçons dans le vent.
Le dessin de Jordi est aussi enlevé que le scénario de Zidrou est plein de tendresse.
" Cette fois, je peux mourir ", dit à un moment de ravissement le papa.
" Tu peux pas mourir, t'es pas assez vieux ", lui répond l'une de ses filles sur un ton d'évidence et dans un large sourire.

 

jeudi 21 juillet 2016

Monet (Claude) et Bazille (Frédéric)

Michel Bernard, Deux remords de Claude Monet,
La Table ronde, 211 pages, 20 €
"

" Au printemps 1862, Renoir, Bazille et lui (Claude Monet) étaient très liés. Tous les trois étaient partis travailler en plein air dans la forêt
de Fontainebleau, à Pâques. Monet revoyait leurs soirées à l'auberge du Lion d'or où ils avaient pris pension. Après le dîner -- la soupe, des œufs frais, du pain blanc et du brie --, devant la cheminée, Bazille écrivait à ses parents, lui, l'ancien de l'armée d'Afrique, songeait en tirant sur sa pipe,
et la servante plaisantait avec Renoir (...) Il faisait beau, et le grand soleil, l'air de la province et la bonne nourriture avaient ravivé l'accent du grand Méridional et sa bonne humeur. Renoir rigolait en voyant le gars du Havre et celui de Montpellier marcher côte à côte. "
Plus qu'à raconter une histoire d'amitié entre peintres (le lecteur croise encore Pissarro, Sisley et Manet dans le roman), Deux remords de Claude Monet s'attache à enter dans la sensibilité que l'on pourrait dire ultime de l'un d'entre eux : Claude Monet. Pourquoi celui-ci fit-il don à l'Etat des Nymphéas contre l'exigence d'acheter son tableau Femmes au jardin et de l'exposer au musée du Louvre ?
Le libraire s'abstiendra d'en révéler la raison. Mais le nom de Frédéric Bazille (1841-1870), peintre pré-impressionniste dont on redécouvre actuellement toute l'importance, n'y est pas étranger.
Le roman de Michel Bernard paraîtra le 18 août et l'on peut d'ores et déjà retrouver Bazille dans un beau livre accompagnant l'exposition de la soixantaine de ses tableaux au musée Fabre de Montpellier.

Frédéric Bazille. La jeunesse de l'impressionnisme,
Musée d'Orsay/Flammarion, 304 pages, 45 €

mercredi 20 juillet 2016

Grande boucle et littérature

Albert Londres, Les Forçats
de la route, Arlée, 64 pages, 6 €
 
Ce sont deux classiques de la littérature sportive. Albert Londres (1884-1932) 
et Antoine Blondin (1922-1991). Tous deux journalistes, tous deux fascinés par la petite reine :
Londres : " On s'habitue à tout. Il suffit de suivre le Tour de France pour que la folie vous semble un état de nature. Le 19 juin dernier, si quelqu'un m'avait dit : vous allez voir sept ou huit millions de Français danser la gigue sur les toits, sur les terrasses, sur les balcons, sur les chemins, sur les places et au sommet des arbres, j'aurais dirigé aussitôt mon informateur vers une maison d'aliénés. "
Blondin : " Trois quarts de siècle d'existence ont suffi au Tour de France pour  créer et exalter une géographie privilégiée qui lui est propre. A travers les modifications qui, d'une année sur l'autre, peuvent affecter l'itinéraire, on retrouve la permanence de quelques hauts lieux. (...)
Une nouvelle carte de France se dessine à l'intérieur de l'autre, dont les provinces sont aux couleurs des champions qui s'y sont illustrés, qui les ont illustrées. "
La mythologie suit son cours. Relativement inchangée.
A la question " Quelle est votre occupation préférée ? " du fameux Questionnaire Proust, Blondin avait répondu : " Suivre le Tour de France. "
Plus terre à terre peut-être, Londres note ce conseil lancé à un coureur du Tour 1924 : " Mange pas de pain ! lui crie un initié, ça gonfle, mange du riz ! "


Antoine Blondin, Sur le Tour
de France, La Table ronde,
158 pages, 7,10 €
 

mardi 19 juillet 2016

Jeunes vacances

Comment impressionner vos enfants,
L'Imprévu, 112 pages, 11,95 €
 
Il n'y a jamais trop d'idées pour divertir les jeunes enfants en cette période phare de l'année : leurs vacances, sinon les vôtres. Un petit livre vous propose même de les impressionner.
En faisant chanter les verres ; en faisant pleuvoir (déjà !) d'un coup de baguette magique ; en leur apprenant à jongler ou en confectionnant des masques légers. Les recettes sont très simples et présentées avec l'humour nécessaire pour vous aider à surmonter l'épreuve.
Une  possibilité supplémentaire s'offre à vous : la visite de l'exposition " Père castor. Raconte-nous ton histoire " qui se tient au musée de l'Illustration jeunesse à Moulins, dans le bel Hôtel Mora. Vous y retrouverez la collection créée en 1930 par Paul Foucher et qui, outre Poule Rousse, Michka, Bourru l'Ours ou La vache orange, compte désormais 2000 titres.
L'exposition est conçue pour mobiliser l'attention des enfants, leurs sens de l'observation des images, leur adresse au jeu. 
C'est ce qui s'appelle tomber à pic.

lundi 18 juillet 2016

Gaëlle Josse à Vichy

Gaëlle Josse,
Prix des Lecteurs A la page 2016
décerné par un jury de lecteurs vichyssois
et Prix France Bleu/Page des libraires 2016,
sera l'hôte de la librairie le
VENDREDI 18 NOVEMBRE PROCHAIN
 
 
Quant à Astrid Eliard,
auteur de Danser (Mercure de France)
qui faisait partie de la sélection du Prix des Lecteurs,
elle vient d'obtenir le Prix Marcel Pagnol 2016.
 
 
 


mardi 12 juillet 2016

Le cri fait fort

Revue du crieur N° 4, 160 pages, 15 €
Sous le titre " Les secrets inavoués du journalisme culturel " ceci dans la dernière livraison de la revue du Crieur :
" Tout bon journaliste est censé maintenir avec le domaine qu'il couvre une distance critique suffisante, ni trop près ni trop loin. Mais cette règle est souvent bafouée (...) Pour remplir les pages Culture, on hésite de moins en moins à accepter les largesses des institutions culturelles : voyages de presse, "partenariats", discrets et publi-information camouflée sont présentées aujourd'hui comme les conditions nécessaires à l'existence même de ces pages... dont l'intérêt décroît en proportion. "
La revue Le Matricule des Anges des mois de juillet-août 2016, présente un dossier consacré à Jack London.
On peut s'y fier.


Le Matricule des anges N°175,
juillet-août 2016, 52 pages, 6 €

lundi 11 juillet 2016

Nestor Burma sur la feuille de match

Nestor Burma contre C.Q.F.D., N° 1, 28 pages illustrées,
Casterman, 2,80 €
Le 12 octobre prochain, soyons précis, paraîtra chez Casterman l'album Nestor Burma contre CQFD, d'après le roman de Léo Malet (1909-1996) initialement paru en 1945.
En avant-première, le même éditeur en propose une prépublication livrable en trois fois, accompagnée d'informations sur l'époque à laquelle se déroule le roman, l'actualité cinématographique et diverses reproductions d'annonces et de "réclames "de ce temps.
Le graphisme bicolore (jaune et noir pour rappeler les classiques du genre policier) signé Moynot-Tardi est réussi. Le dessin  des scènes et des objets parisiens, comme les quais du métro, les immeubles d'angle ou les machines à écrire, est finement étudié et rendu.
Le personnage de Burma, lui, est mythique. Un Marlowe ou un Sam Spade français, comparaison qui irritait Léo Malet, qui assurait avoir eu sur eux la primeur littéraire.
Pour revenir à 2016, on notera que le dernier roman de Philip Kerr, Le Mercato d'hiver, se déroule dans le milieu du football, qu'affectionne l'auteur. Son héros, Scott Manson, est l'entraîneur d'un club londonien dans les tribunes duquel un meurtre vient de se produire.
Le libraire botte en touche.

Philip Kerr, Le Mercato d'hiver,
traduit de l'anglais par Katalin Balogh
et Philippe Bonnet, Le Masque,
447 pages, 20 €

.

dimanche 10 juillet 2016

Jardinier extraordinaire

Les Paradis naturels. Jardins chinois en prose,
traduits et présentés par Martine Valette-Hemery,
Picquier poche, 206 pages, 7 €
Liu Shilong, tel est le nom de l'un des jardiniers préférés du libraire. Un jardinier dont on ne risque pas d'entendre la voix sur les ondes dominicales :
il vécut dans la Chine traditionnelle et ses dates de naissance et de mort sont inconnues.
La particularité du jardin de Liu Shilong est qu'il
n'a pas d'existence physique. C'est un jardin qui n'existe que dans la tête de ce fin lettré adepte de la construction imaginaire, des paysages nés de la vision intérieure.
Un aussi formidable jardinier peut ainsi tous les jours faire le tour du propriétaire ; admirer ses allées plantées de bambous ; ses bassins où croassent les grouilles ; son exubérance de formes ; ses espaliers de fleurs grimpantes ; ses rochers qui imitent en miniature les sommets.
Pas de danger qu'il s'y casse les reins à bêcher
ni n'attrape des ampoules aux doigts ! " Puisqu'il n'existe que dans mon esprit, les tempêtes et les orages ne peuvent pas plus lui nuire que les inondations et les incendies ", précise le jardinier un brin cossard. Avant d'ajouter malicieusement :
" Des fils et petits fils sans scrupules ne peuvent en vendre le moindre brin d'herbe. "
La jardin de Liu Shilong occupe quelques pages dans Les Paradis naturels parmi d'autres Jardins chinois en prose qui viennent de paraître en poche. Le libraire conseille la visite imminente du Kiosque des Vagues Bleues ; du Jardin du Ruisseau de Rêve ; du Jardin du Hasard, de la Tour de tous les Possibles...

samedi 9 juillet 2016

Le meilleur ami de Montaigne et de l'homme

La Boétie, Discours de la servitude
volontaire, GF, 238 pages, 5,90
Les élèves fondus de maths, de physique et de chimie qui préparent leur entrée aux grandes écoles scientifiques cette année n'ont pas toutes les malchances.
Le programme de français-philosophie, qui porte sur
le thème " Servitude et soumission ", implique l'étude
du Discours de la servitude volontaire, d'Etienne de La Boétie, l'ami sarladais de Montaigne ( " Parce que c'était lui, parce que c'était moi "). On a vu pire.
Lorsqu'il rédige ce brûlot de quelques dizaines de pages, La Boétie a quasiment le même âge (dix huit ans) que les élèves qui doivent aujourd'hui plancher sur son texte. Nous sommes en 1549. Depuis, bien qu'il soit moins épais que les Evangiles,  Le Prince de Machiavel ou Le Traité de désobéissance civile de Henry David Thoreau, il a fait comme eux le tour du monde. La question qu'il pose est de savoir comment un seul homme peut imposer son pouvoir à tous les autres et le maintenir.
Il n'échappe évidemment pas à La Boétie qu'un phénomène aussi extraordinaire que la tyrannie ne serait pas possible si le tyran n'usait de stratagèmes éprouvés (du pain et des jeux) pour le maintenir dans la soumission. Mais toute l'originalité de sa thèse consiste à dire que le peuple, de son côté, participe à sa propre oppression et apporte son soutien actif à la tyrannie. 
La devise de La Boétie que devront méditer les heureux étudiants est la suivante : " Ce sont donc les peuples mêmes qui se laissent ou plutôt se font gourmander, puisqu'en cessant de servir ils en seraient quittes. "
Le libraire vous souhaite un bon samedi.

vendredi 8 juillet 2016

Deux récits intimistes

Pierre Bergounioux, Cousus ensemble,
Galilée, 66 pages, 14 €
... mais pas nombrilistes. Dans Cousus ensemble, Pierre Bergounioux s'interroge sur les moments de grâce parfaite qu'il a pu connaître dans son existence. Et très vite pose le diagnostic qu'ils furent, si on pouvait les coudre ensemble, d'une étoffe  très éphémère et très inexplicable.
Sur le ton de la confidence, qui n'exclut pas la gravité ni ne gomme l'existence du monde extérieur, Bergounioux reprend et reprend de nouveau sa phrase longue et riche pour recouvrer par l'esprit ses moments de bonheur dans la petite enfance et plus tard et s'apercevoir que, mis bout à bout dans la totalité de sa vie, ils n'ont guère occupé davantage que " l'espace d'une matinée ".
Ecrit dans un jardin, ce sont quelques pages rééditées
de Marguerite Yourcenar. Quelques pages consacrées
à l'air et au feu, à la terre et à l'eau, comme dans le signe alchimique. Quelques pages prélevées au grimoire de la nature pour dire, là aussi, quelques instants privilégiés,
des " instantanés ", pressés de passer comme la flèche ou la flamme de quelques oiseaux. " L'espace d'un déclic ". 


Marguerite Yourcenar;
Ecrit dans un jardin,
Fata Morgana, 10 €



jeudi 7 juillet 2016

Quels choux ces monstres !

Alors qu'ils n'ont pas encore rencontré Quasimodo, les Cyclopes, Dracula ou Mr Hyde,
les enfants donnent à leurs peurs sans nom différentes formes d'entités monstrueuses.
Celles-ci habitent la Forêt-monstre, la ville-monstre, la nuit-monstre, la chambre-monstre ou le tout ensemble.

Enrique Quevedo, A la nuit tombée,
Seuil Jeunesse, 13,50 €


Valentin Mathé, Eva Bourdier,
Des monstres dans la ville, La poule qui pond, 13,50 €
 


Magdalena, Christine Davenier,
Les Monstres de la nuit, Père Castor, 13,50 €

Ces peurs, on sait bien qu'elles sont ambigües, signes de l'angoisse qui assiège le petit d'homme, mais aussi preuves de son désir d'ouverture et d'aventure.
Du coup, les monstres sont partout. Chez Homère et chez Hugo ; dans les romans gothiques et dans les tableaux de Bosch ; dans le monde du dehors comme dans le monde du dedans. Et dans de nombreux albums pour les enfants. (Le libraire ne compte pas dans son inventaire les créatures qui hantent le dessin animé ou les jeux électroniques.)
L'un des plus connus, et qui engendra une abondante postérité monstrueuse, est l'inoxydable Max et les Maximonstres de Maurice Sendak, au dessin très sûr, et où l'on voit Max devenir le roi des Maximonstres, ou se prendre pour tel, avec pour unique devise : même pas peur !

Maurice Sendak, Max et les Maximonstres, Ecole des loisirs, 12,70 €


mercredi 6 juillet 2016

On y danse, on y danse !

Emmanuelle Loyer, Antoine Baecque,
Histoire du festival d'Avignon, Gallimard, 648 pages, 42 €
C'est aujourd'hui que s'ouvre le festival d'Avignon, soixante-dixième du nom. " In " officiel et
" off  " indépendant réunis, tous les styles de spectacle y seront représentés jusqu'au 24 juillet : théâtre, musique, danse, mais aussi marionnettes, cirque, poésie, clowns.
Depuis sa création où, sous l'impulsion de Jean Vilar,
il durait une semaine et présentait quelques pièces, le festival est passé par de nombreuses mutations, quelques orages, plusieurs réformes et maintes mises en scène scintillantes.
C'est ce passé que relate en détail, jusqu'aux dix dernières années,
la nouvelle édition, revue et augmentée de L'Histoire du Festival d'Avignon. Compagnies, acteurs, metteurs en scènes qui ont défilé à Avignon s'y trouvent restitués, de même que sont retracés les enjeux politiques et culturels d'une manifestation publique aux dimensions internationales.

mardi 5 juillet 2016

La table raconte le monde

Massimo Montanari, Les Contes de la table,
traduit de l'italien par Jérôme Nicolas,
Seuil, 253 pages, 19
Que la littérature et l'imaginaire soient remplis de rêves liés à la nourriture et aux saveurs ne devrait pas surprendre les gourmands, dont le libraire fait partie.
Les romans de chevalerie, les contes, les vies des saints, notamment, en sont, si l'on ose dire, truffés. L'historien Massimo Montanari a eu l'idée  d'en extraire le suc dans des contes traditionnels, pour la plupart traditionnels, qui nous transportent au moyen-âge dans la peau de Charlemagne, de saint François d'Assise ou encore de Christine de Suède. C'est au pays de Cocagne que, fort logiquement, se termine ce voyage chez les bons vivants du passé européen.
" La table raconte la faim et les efforts des hommes pour la transformer en source de plaisir. Elle raconte l'économie, la politique et les rapports sociaux.  Elle révèle les traits intellectuels, philosophiques et religieux d'une société. La table raconte le monde ", écrit Massimo Montanari.
Le livre est pimenté par les illustrations bicolores, oranges et noires, façon années 1950, de Harriet Taylor Seed.
Bernard Pivot avait animé un célèbre Bouillon de culture, on s'en souvient peut-être.
Ce Lyonnais de naissance nous parle de festins dans son dernier livre. Sauf que ce sont, dit-il,
" les mots qui nous grignotent, ce sont les livres qui nous avalent ", et non le contraire, comme le pensent les auteurs qui se croient  omniscients. Au secours les mots m'ont mangé a été écrit pour être dit sur scène. Un CD l'accompagne de façon à joindre au plaisir gustatif celui de l'audition.

Bernard Pivot, Au secours ! Les mots m'ont mangé,
Allary éditions, 102 pages, 18,90 €